Depuis cinq ans, les acteurs de la finance s’intéressent à la blockchain. Le processus de KYC, régulièrement source d’irritants pour les banques et leurs clients, constitue un cas d’application pour cette technologie. À la clé, des enjeux de connaissance client, de conformité et de sécurisation de l’information. Explications avec Pierre Rognion, Consultant Senior chez Twelve Consulting.
Pourquoi est-ce le bon moment pour s’intéresser à la blockchain ?
Dans les dix prochaines années, des solutions s’appuyant sur la blockchain vont émerger dans notre quotidien sans que l’utilisateur final en ait nécessairement conscience. Qui aujourd’hui envoie un email en pensant à toute la complexité des protocoles nécessaires tels que TCP/IP ? La blockchain offre des possibilités particulièrement intéressantes et pourrait révolutionner la connaissance client. Les banques en ont clairement pris conscience. On l’a vu à partir de 2014 avec la formation du consortium R3 et plus récemment, avec JP Morgan qui investit dans la technologie de ZCash ou des sociétés comme Ripple qui multiplient les partenariats avec des banques à travers le monde.
Quels sont les challenges actuels autour du KYC ?
En résumé : l’expérience utilisateur, qu’il soit client ou collaborateur dans une banque, est souvent mauvaise. Il faut fournir les mêmes documents à de multiples reprises, la réglementation évolue constamment, la vérification des pièces est longue et complexe. Cela est fastidieux pour le client et pour les banques. Les technologies actuellement utilisées manquent de flexibilité, l’information est silotée. D’ailleurs, il n’y a pas toujours autant de sécurité qu’on voudrait le croire. En témoigne le piratage de l’OPM aux Etats-Unis où les données de 30 millions de personnes ont été dérobées. Les clients ne savent pas à quoi vont servir les données et combien de temps elles seront conservées même si ces points sont théoriquement adressés par l’application du RGPD.
Quelle est la valeur ajoutée d’une blockchain dans le processus de KYC ?
Tout d’abord, davantage de sécurité. Le stockage d’informations via une blockchain permet d’avoir de la traçabilité, de la transparence lorsque c’est nécessaire et rend quasi impossible la possibilité de falsifier ou voler des données. Les banques ont tout intérêt à mettre en place une base de données partagée et accessible depuis une blockchain (qu’elle soit privée ou publique) et qui pourrait permettre de répondre à ce défi d’amélioration de processus, d’expérience et de sécurité. Le « privacy by design » imposé par le RGPD est clairement là.
Concrètement, comment cela pourrait fonctionner et améliorer l’expérience ?
C’est très simple : le client aurait le contrôle sur les informations qu’il partage et pourrait le faire simplement. On effectuerait alors un processus de vérification, mais il n’y aurait plus à le ré-exécuter à chaque fois. Cela pourrait permettre d’économiser beaucoup de temps et d’argent aux banques, notamment pour les procédures LCB-FT, MiFiD II, la lutte contre la fraude fiscale et l’usurpation d’identité.
Que pourrait être le KYC de demain et comment l’abordez-vous chez Twelve ?
La principale difficulté à l’heure actuelle n’est pas tant technique qu’organisationnelle. Le secteur bancaire doit être en phase sur la marche à suivre. En tant que spécialistes des secteurs banque-assurance-santé, ainsi que de l’expérience utilisateur-client, nos collaborateurs sont bien placés pour accompagner ces évolutions. Notre expérience des secteurs règlementés nous permet aussi de transformer ces contraintes (LCB-FT, RGPD, MiFiD II) en autant d’opportunités.