Depuis maintenant 10 ans, les laboratoires pharmaceutiques ont pris un virage important pour opérer leur transformation digitale et s’orienter vers des stratégies « Client ». Ils ont massivement investi (1) dans des outils de gestion de la relation client : CRM, portail médecin, application mobile, plateforme marketing, ou services digitaux destinés aux patients. Sur la même période de 10 ans (2), nous avons constaté une baisse de 25% des effectifs des forces de vente, une perte de brevets des médicaments « blockbuster » et une évolution du portefeuille vers la médecine de spécialité. La promotion des médicaments s’est adaptée à ce nouveau contexte : les laboratoires de princeps (3) ont augmenté leurs activités auprès des centres hospitaliers avec des profils plus scientifiques, tandis que les laboratoires de médicaments génériques ont renforcé leur pression commerciale auprès des officines.
Ces initiatives ont-elles réellement eu un impact sur la relation entre les laboratoires et les professionnels de santé ?
- Une connaissance du professionnel de santé encore très mercantile
L’essor des services digitaux à destination des professionnels de santé a indirectement créé de nouvelles opportunités pour mieux les connaitre : une potentielle mine d’or de connaissances qui ne demande qu’à être valorisée. Toutefois, la pratique de la collecte de données n’est pas bien ancrée : récupération non structurée, non consolidée, données non exploitées et des volumes trop faibles pour tirer de vrais constats.
- Une force de vente réorganisée, mais un format de visite médicale (4) inchangé
La visite médicale reste le point de contact principal entre les laboratoires et les professionnels de santé. Mais elle ne répond pas aux évolutions des attentes des professionnels de santé et est majoritairement effectuée en présentiel, avec un temps moyen de visite toujours très court et un discours majoritairement orienté produit.
- Une communication digitale omniprésente mais sans logique de parcours
Avec une augmentation de 50% des dépenses liées aux opérations d’emailing et réseaux sociaux en 5 ans (5), on observe un réel effort de la part des laboratoires pharmaceutiques d’utiliser les nouveaux outils à leur disposition. Toutefois, ces opérations restent des actions isolées qui ne sont malheureusement pas intégrées dans une logique globale de parcours médecin.
Malgré ces efforts, la relation entre les laboratoires et les professionnels de santé a peu évolué, et la logique transactionnelle reste prépondérante. In fine, les laboratoires privilégient encore leurs produits à leurs clients.
Pourtant, les laboratoires qui changeront de paradigme pourront acquérir un véritable avantage concurrentiel !
Engager les professionnels de santé à travers une meilleure expérience client permet de générer la préférence de marque, atout non négligeable dans l’environnement très concurrentiel de l’industrie pharmaceutique. Pour ce faire, il faudra prendre le sujet sous le bon angle et se donner les moyens d’aller jusqu’au bout. Nos 3 clés pour y arriver :
#1 : Compléter la stratégie relationnelle actuelle avec une logique d’engagement des professionnels de santé
Afin de répondre aux attentes de chaque professionnel de santé, il est important de mettre en place des parcours hybrides et personnalisés, en adaptant les interactions à leurs préférences :
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- Repenser la visite médicale et les congrès comme des moments privilégiés, afin d’apporter plus de valeur aux professionnels de santé : expertise scientifique et médicale, conseils liés à l’évolution du rôle du patient et à la transformation de l’hôpital /officine ainsi que l’accompagnement dans l’usage de services proposés par le laboratoire.
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- Utiliser les canaux digitaux comme des leviers promotionnels pour supporter les activités à faible valeur ajoutée humaine (inscription à des évènements, prises de commande…) afin d’y consacrer moins de temps en visite
- Proposer des services digitaux pour faciliter les activités quotidiennes du professionnel de santé (optimisation de l’utilisation d’un produit, suivi patient) et prolonger l’expérience avec le laboratoire
Il est impératif que ce parcours médecin soit co-construit avec les différentes équipes (Marketing, Vente, Digital) pour assurer une cohérence des interactions avec le professionnel de santé.
#2 : Valoriser les solutions en place pour une mise à l’échelle rapide et efficace
Les laboratoires sont déjà bien équipés technologiquement. Avant de faire l’acquisition de nouveaux outils, ils doivent apprendre à bien utiliser les outils existants :
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- Alimenter les outils avec des données pertinentes. L’un des premiers challenges sera de systématiser la collecte de données sur les canaux digitaux et physiques. Ceci inclut les données comportementales issues du parcours emprunté par les professionnels de santé, mais aussi les données d’utilisation des services et celles liées à la visite médicale.
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- Décloisonner les briques technologiques en place, afin de les faire interagir intelligemment, et pouvoir centraliser sa connaissance client. Par exemple, en collectant la donnée d’utilisation d’un site de formation dans le CRM.
- Enfin, valoriser la connaissance client, en créant de nouveaux segments plus fins (croisement de différentes sources de données), permettant une personnalisation de la relation avec les professionnels de santé.
La mise en place de ces 3 bonnes pratiques permettra aux laboratoires de construire des fondations technologiques solides et d’envisager par la suite l’intégration de données provenant de tiers pour aller plus loin dans la connaissance des professionnels de santé.
#3 : Transformer les mentalités et insuffler les nouvelles pratiques auprès de vos équipes
Des équipes marketing, en passant par le médical, le terrain et les professionnels de santé, chaque partie prenante a un rôle à jouer dans la création et la mise en place de cette nouvelle stratégie relationnelle. En interne, l’enjeu majeur sera de transformer les mentalités des équipes. Il faudra former, communiquer et piloter l’adoption, depuis l’essence du projet, au moment du lancement et dans la durée. En externe, le défi sera de co-construire avec les professionnels de santé la relation de demain. Ils deviendront ainsi naturellement les premiers ambassadeurs, et feront rayonner les services développés auprès de leurs confrères.
En résumé, les 10 dernières années, les laboratoires ont beaucoup parlé de stratégie client et ont investi dans des outils CRM. Ils doivent maintenant apprendre à les utiliser et aller jusqu’au bout de leurs initiatives pour générer la préférence de marque des professionnels de santé. Le dernier kilomètre pour y arriver reste un défi à relever, mais le résultat sera au rendez-vous !
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Ou contactez directement : Jérémy Daclinat jeremy.daclinat@twelve-consulting.com
1 Plus d’un million d’euros en moyenne par laboratoire uniquement pour l’implémentation d’un CRM. Chiffres issus de notre étude CRM.
2 “Enquête Emploi Des Entreprises Du Médicament – Reprise Précaire Et Dépendante De L’attractivité Française.” déc. 2017 Leem, www.leem.org/index.php/presse/enquete-emploi-des-entreprises-du-medicament-reprise-precaire-et-dependante-de-lattractivite
3 Laboratoire qui commercialise des princeps. Un princeps est un médicament qui incorpore pour la première fois un principe actif qui a été isolé ou synthétisé par un laboratoire pharmaceutique. Il s’agit en quelques sortes du médicament « original », protégé par un brevet d’une durée variable (de l’ordre de 10 ans) qui assure au laboratoire qui l’a déposé l’exclusivité de son exploitation et de sa commercialisation (il est le seul à pouvoir vendre un médicament avec ce principe actif). Webphysique.fr
4 Visite médicale : rendez-vous entre un visiteur médical et un professionnel de santé pour présenter les produits, de répondre aux questions sur leur efficacité, leur tolérance, les éventuels effets secondaires, ou les modalités de prise en charge.
5 « Promotion du médicament : le visiteur médical reste un vecteur essentiel » (mai 2013) Pharmanalyses
http://pharmanalyses.fr/promotion-du-medicament-le-visiteur-medical-reste-un-vecteur-essentiel-2/
Inès Costa d’Ascensao
Consultante
Jérémy Daclinat
Manager